Procédures et réglementations

Quasi-usufruit : c’est quoi ?

Par Nicolas , le 1 mars 2023 - 7 minutes de lecture
Comprendre le concept de quasi-usufruit

Le quasi-usufruit est une notion assez proche de l’usufruit, mais avec certains points de divergences. Ce composant du droit de propriété permet au quasi-usufruitier de disposer d’un bien consomptible sur lequel porte son usufruit.

Comprendre la notion de quasi-usufruit

D’après le Code civil en son article 544, le droit de propriété correspond au droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, cela dans les limites d’usage non prohibé par les lois ou par les règlements. Ce droit est constitué par trois principaux éléments.

  • L’usus : le droit d’usage ou de possession du bien ;
  • Le fructus : le droit de percevoir les fruits du bien. Il s’agit tout simplement du droit de jouissance, soit de pouvoir percevoir des revenus issus du bien ;
  • L’abusus : le droit de disposer du bien, qu’il s’agit de sa vente, de sa donation ou de sa destruction.

Il est question de démembrement lorsque ces attributs sont détenus par des personnes différentes, bien distinctes. Le droit d’usufruit confère à son titulaire ou l’usufruitier de disposer d’un bien ainsi que d’en percevoir les revenus.

Dans le cas d’un bien immobilier, le droit d’usufruit donne la possibilité à l’usufruitier d’occuper un bien à titre personnel, de le louer ainsi que d’en encaisser les fruits.

L’abusus ou le droit de disposer du bien appartient ainsi à un autre individu, appelé le « nu-propriétaire ». Ce dernier deviendra le plein propriétaire du bien seulement à l’extinction du titulaire de l’usufruit. Dans ce cadre, un accord entre l’usufruitier et le nu-propriétaire est indispensable avant de disposer intégralement d’un bien.

Avec un fonctionnement un peu particulier, le quasi-usufruit porte spécifiquement sur des biens consomptibles, c’est-à-dire que l’usage n’est pas possible sans leur consommation. Le terme le plus approprié pour désigner le quasi-usufruitier est le quasi-propriétaire. Ce dernier peut disposer de la pleine propriété durant la période du démembrement à la place du nu-propriétaire. Cependant, il reste redevable d’une dette, en nature ou en valeur au profit du nu-propriétaire, appelée créance de restitution. En effet, le quasi-usufruitier devra s’acquitter de cette dette dont la valeur devra être proportionnelle à la valeur du bien au jour du démembrement.

Les droits du quasi-usufruitier sont également limités par la valeur de cette créance de restitution. Celle-ci n’est remboursable auprès du nu-propriétaire qu’à l’issue de l’usufruit, plus précisément, à la fin de la période retenue en cas d’usufruit temporaire, ou bien au décès de l’usufruitier dans le cas où l’usufruit serait principalement utilisé en viager.

L’intervention de la créance de restitution implique que le bénéficiaire de la nue-propriété ne dispose pas réellement du droit de propriété à compter de l’ouverture du démembrement. Il est uniquement propriétaire de la créance de restitution. Par ailleurs, cette créance étant assimilable à un élément du passif, il peut faire, au terme de l’usufruit, l’objet d’une déduction de l’assiette fiscale.

Le quasi-usufruit : les formes possibles

Le droit de quasi-usufruit porte sur les biens consomptibles. Du fait que le bien ne peut être utilisé sans qu’il y ait action de sa consommation, nous parlons automatiquement d’un quasi-usufruit légal.

Si l’application du droit de propriété en quasi-usufruit peut concerner les biens consomptibles, son usage peut néanmoins s’étendre sur des biens non consomptibles. Il est ici question d’un bien désigné de « fongible ». Par définition, un bien fongible est un bien qui ne peut pas être individualisé, plus précisément, qui n’a pas d’identité propre. Une chose fongible ne peut être déterminée que par son espèce ou par sa quantité. Les biens fongibles sont substituables par une chose du même genre, comme le sont les billets de banque, dont la restitution permet l’obtention d’un bien équivalent, sans qu’il soit d’une même nature.

Il est cependant à noter que cette extension de la notion de quasi-usufruit aux biens dits fongibles n’est applicable que dans le cadre d’une convention. Il s’agit ainsi de quasi-usufruit conventionnel. 

La mise en place du quasi-usufruit conventionnel nécessite un démembrement conventionnel et est encadrée par la rédaction d’un acte authentique ou acte sous seing privé enregistré. La mise en place d’une convention de quasi-usufruit permet au nu-propriétaire d’opposer à l’administration fiscale la dette de restitution venant réduire l’actif successoral taxable à l’extinction du quasi-usufruit. Il est à préciser qu’il n’est pas redevable aux droits de succession.

Quels sont les avantages du quasi-usufruit ?

La convention de quasi-usufruit octroie à son bénéficiaire des privilèges juridiques non négligeables, quand bien même, il donne lieu à la restitution d’une créance en faveur du nu-propriétaire. Le quasi-usufruit permet au titulaire de ce droit de disposer d’un bien consomptible et/ou fongible, de l’utiliser librement dans un contexte dans lequel la convention d’usufruit classique ne le permet pas. Que la nue-propriété d’un bien soit transmise à une personne physique ou une personne morale, le donateur conserve le quasi-usufruit du bien concerné et peut par la même occasion avoir une maîtrise plus pointue de son patrimoine. De même, le donateur du bien peut réaliser la cession de la part non consomptible du bien identifié, le quasi-usufruit n’étant applicable que sur les biens consomptibles.

Hormis ses avantages successoraux et fiscaux, la pratique du quasi-usufruit permet d’étendre les pouvoirs du titulaire du droit d’usufruit classique et de protéger le nu-propriétaire à travers la créance de restitution. Il confère ainsi une réelle sécurité juridique au nu-propriétaire au cours du contrat de démembrement.

Dans le secteur des placements en valeurs mobilières, le quasi-usufruit correspond à un excellent moyen pour le maintien de la gestion de portefeuilles sans faire face à de lourdes contraintes. Et au-delà des obligations en termes d’inventaire et de cautionnement, l’obligation d’emploi vise à garantir la restitution des éléments consommés lorsque l’usufruit ne le permet plus. C’est pourquoi le quasi-usufruitier doit s’assurer d’obtenir l’autorisation de la nu-propriété préalablement à l’usage des biens ou de la somme disponible.

En application du Code civil article 618, un abus de jouissance donne lieu à une sévère sanction délivrée par le Tribunal de Grande Instance.

Le quasi-usufruit : autres informations utiles sur ce droit

Que se passe-t-il dans le cas de l’extinction du quasi-usufruit ? Lorsque le quasi-usufruit est appliqué sur un support monétaire, une quelconque réévaluation n’est pas possible en raison du principe du nominalisme monétaire régi par le contrat de remboursement de prêt, et cela, quel qu’il puisse être l’évolution du cours de la monnaie. En d’autres termes, l’application des dispositions prévues par l’article 1895 du Code civil concernant la créance de restitution est en vigueur.

La loi stipule qu’à défaut d’une disposition contraire dans un contrat d’obligation lié à un prêt en argent, la référence reste la somme numérique prévue sur le contrat. Dans le cas d’un bien consomptible duquel la valeur est appréciée par le bénéficiaire au cours de la période de démembrement, sa valeur de restitution devra être revalorisée à la même proportion.

Pour les cas de quasi-usufruit en assurance-vie, en démembrant la clause bénéficiaire, le souscripteur peut réaliser des versements aux bénéficiaires sous la forme de quasi-usufruit afin de les protéger. Comparé à un contrat conventionnel, le quasi-usufruit en assurance-vie octroie un meilleur avantage fiscal appréciable sur le long terme.

Dans le cas d’un quasi-usufruit encadré par un contrat de capitalisation, le souscripteur peut réaliser une donation à moindres coûts, ses ayants droit (enfants), avec la possibilité de converser ses droits en matière de sécurisation de son bien.